PARCOURS PICTURAL

Paris – Avignon – Caromb

Peindre c’est donner chance à des espaces intérieurs comme à des mémoires non transmises de prendre corps et place dans le tableau, d’y acquérir droit de cité. C’est permettre à ce qui s’est figé de reprendre son cours, d’entrer dans une aire de jeu – et de partage -. Figuration et abstraction s’entrelacent dans cette opération périlleuse et magique : donner vie.

Le travail pictural pour moi s’articule entre quatre pôles. Bâtir (instaurer un espace fixe dans la toile, un habitacle ) et Cheminer , retrouver le flux quitte à se déloger, réengager le mouvement de la création. Se remettre en jeu est une nécessité existentielle autant qu’un enjeu artistique. C’est d’Advenir qu’il est question : quand se produit la note juste, l’accordage au présent. Dévisager : lorsque se voir et voir l’autre devient possible. Ce début d’alphabet (Advenir, Bâtir, Cheminer, Dévisager) est ma boussole, qui peut accompagner le regardeur dans sa visite.

La Chapelle des Pénitents Gris de Caromb m’offre l’occasion de déployer un grand nombre de toiles (une cinquantaine aux murs) et de créer une scénographie visant à restituer l’itinéraire pictural que je trace depuis que la peinture à l’huile est devenue mon moyen d’expression privilégié. J’ai eu un trajet professionnel centré sur les Lettres puis la psychologie clinique, ce n’est pas étranger à ce qui m’anime : la recherche d’une langue souterraine à exhumer.

De part et d’autre de la nef et derrière l’autel de la Chapelle, j’installe des « Stations », ou chapitres : sept séquences (d’environ 7 à 10 toiles) pour raconter chacune une étape, le processus d’accession à un nouvel état (de forme, d’être). Les toiles ont certes chacune leur identité, leur vie propre ; mais agencées en compositions murales (en « tableaux »), elles dialoguent entre elles et peuvent se mettre également au service d’une narration. Formant un chœur, elles témoignent en une sorte d’épopée silencieuse dont le thème serait l’accès à la vie : comment s’incarner, se rendre véridique, se rendre – par l’onction de l’huile et des pigments de l’arsenal du peintre- au plus près de sa lumière intérieure.